Dimanche 19 décembre
Il faudra que j’écrive sur cette catégorie particulière de l’humanité que sont les femmes qui font de la musculation. Je ne parle pas de celles qui font des concours, je n’en connais pas. Je parle de celles que je croise et qui semblent se tenir loin des podiums. Elles ont toutes un mode d’être au monde commun, mais difficile à identifier et plus encore à décrire.
Il ne s’agit pas seulement de la revendication évidente parce qu’immédiatement visible d’une supposée « part masculine » – lieu où peu de femmes osent aller par peur de ne plus plaire. Au contraire il y a quelque chose de tacite. Un parcours qui ne se dit pas. Comme un secret à l’origine de ce travail acharné sur soi. Pas forcément un traumatisme, ce serait trop simple et trop con, mais quelque chose qui reste inaccessible aux mots.
Et plus ce secret est intime, plus la jubilation de la transformation et la joie de se sentir puissante éclatent aux yeux de ceux qui les observent. Mais encore une fois, tout se passe dans le silence. Ce silence est très touchant. Les gens qui agissent sans passer par les mots ont mon admiration. Le silence est le signe d’une grande force (celui qui se tait se fiche de partager – il est indifférent aux autres – s’est débarrassé de toute séduction – n’agit que pour lui-même). Le silence est toujours d’or. Or les body-buildeuses ne parlent pas de leur corps. Pourtant elles ne sont plus que lui, je veux dire celui qu’elles ont forgé.
Elles sont devenues l’expression libre et muette de leur intimité.