165 – nrj

Vendredi 18 mars

Il y a des gens qui semblent générer et reconstituer l’énergie qu’ils dégagent, parfois l’économiser ; en avoir, l’un dans l’autre, « la maitrise ». Et d’autres qui donnent toujours l’impression de puiser dans leurs dernières ressources. D’aller taper dans les réserves. Seul le vieillissement – et c’est là son véritable intérêt, tout littéraire – rend cette scission entre les hommes absolument flagrante.

143 – aise

Vendredi 28 janvier

Ainsi donc il existerait un monde parallèle où les candidats à la présidentielle se battent pour aller dans une émission intitulée Face à Baba, où Zemmour n’est plus chroniqueur chez un ancien comique, où une primaire de gauche est organisée en fanfare par des gens de droite et où il est admis par tous que la levée des restrictions sanitaires dépende du calendrier électoral. Je suis bien aise de n’en percevoir rien d’autre que le lointain écho qui m’en parvient quand, à la fin du mois, je survole les titres d’un journal auquel je ne suis de toute manière pas abonnée.

Le monde – le vrai – est de ce coté-là. Celui qui décide de s’y installer, rien ne peut l’en déloger.

Et soudain dans ce monde peut en surgir un autre encore, lorsque par exemple un visiteur de Malika se place dehors, amusé, derrière une fente du mur de son petit café, pour feindre d’être en prison. Un monde joyeux en un éclair. Toute l’intelligence dont nous sommes capables.

141 – épuisement

Vendredi 21 janvier

L’enfant refuse de faire son exercice, il fait mine de dormir. Soudain prend un stylo et se penche sur une feuille de classeur. Se met à écrire. Redresse furtivement la tête. Au bout de vingt minutes il se lève. Vient me montrer : une description minutieuse de ce qu’il voit et entend depuis le fond de la salle. Pendant qu’il lit à voix haute je cherche sur mon ordinateur. Je lui montre Tentative d’épuisement d’un lieu parisien. Il regarde avec curiosité. Presque incrédule. Interroge : c’est qui Perec est-ce qu’il est mort où c’est Sulpice. Regarde encore un peu. Repart épuiser, joyeux, sa propre tentative.

134

Mercredi 5 janvier

Cyrano à Roxane certaine que Christian n’est pas un sot alors qu’elle ne lui a jamais parlé :

« Oui tous les mots sont fins quand la moustache est fine. »

La réplique en elle-même est déjà excellente. Prononcée par Depardieu dans un mélange parfait d’ironie et de désespoir – les deux ensemble, à l’équilibre -, elle devient carrément géniale.

123 – bâillement

Vendredi 17 décembre

Il serait bon qu’un jour (un jour avant par exemple avril 2022), au lieu de relayer les innombrables appels inutiles à l’union de la gauche, un journaliste – un seul ferait mon bonheur – explique que :

– l’enjeu des candidats dits de gauche à l’élection présidentielle n’est pas d’être élus président de la république mais de préparer la suite : devenir le meilleur futur opposant, placer ses futurs députés et le devenir lui-même (national ou européen, on prendra ce qui viendra), asseoir son pouvoir au sein du parti, avoir le droit de passer un peu plus que les autres à la télévision pendant les 8 prochains mois et gagner des abonnés sur Tiktok (le Graal) ;

– dans cette perspective, il est absolument normal que chacun reste dans son couloir ;

– et donc, risquer de disparaître prématurément à l’issue d’une primaire n’a tout simplement aucun sens.

Bref, qu’il fasse un peu d’analyse politique et moins de feuilletonnade. On peut rêver.